Pr. David Adams, Dr. Céline Labeyrie,
Dr. Térésa Antonini, Dr. Cécile Cauquil,
Dr. Antoine Rousseau, Pr. Michel Slama
Pr. David Adams, Dr. Céline Labeyrie,
Dr. Térésa Antonini, Dr. Cécile Cauquil,
Dr. Antoine Rousseau, Pr. Michel Slama
Plus de 500 cas ont été diagnostiqués en France ; ceci dans la plupart des départements, en métropole et DOM-TOM. Cette maladie concerne l’adulte (après 20 ans). L’âge de début de la maladie est très variable : vers 30 ans chez les patients originaires du Nord du Portugal (où de très nombreuses familles sont atteintes) ou plus tardif (vers 60 ans en moyenne) pour les sujets d’origine non portugaise.
Il s’agit d’une maladie potentiellement très grave et invalidante en l’absence de traitement et de prise en charge spécialisée.
Les manifestations révélatrices sont très variées expliquant en grande partie le retard diagnostic. Elles traduisent des dysfonctionnements des nerfs périphériques sensitifs et moteurs, et végétatifs.
Lire plusIl peut s’agir de :
Au cours de l’évolution, les troubles sensitifs s’étendent progressivement jusqu’aux genoux, puis aux mains ; la faiblesse des membres s’accentue et les troubles végétatifs s’aggravent.
L’atteinte cardiaque est très fréquente, surtout lorsque la maladie débute tardivement dans la vie, et en fonction du type de la mutation sur le gène responsable de la maladie.
Ces manifestations sont silencieuses pendant de nombreuses années d’où l’intérêt d’un suivi cardiologique régulier.
Il peut s’agir de:
Lorsque le cœur commence à être touché par l’amylose, le patient peut ne pas s’en rendre compte. La recherche d’une atteinte cardiaque est donc indispensable et nécessite un bilan initial complet. Le dépistage précoce est extrêmement important car il conditionne un traitement rapide, dès la mise en évidence des premières anomalies.
Il existe plusieurs types d’atteintes oculaires, qui dépendent du siège des dépôts amyloïdes dans l’œil, et varient beaucoup selon les patients.
Lire plusPour toutes ces raisons, il est indispensable de bénéficier d’un dépistage ophtalmologique systématique puis d’un suivi régulier des atteintes vitréennes (acuité visuelle et fond d’œil), du glaucome (tension oculaire, et au moindre doute champ visuel et analyse des fibres du nerf optique par OCT) et de la sécheresse oculaire.
Atteinte rénale (protéinurie, insuffisance rénale) ou exceptionnellement des méninges avec maux de tête et confusion.
Le diagnostic de neuropathie amyloïde est plus ou moins difficile et reste encore retardé ; sachant que jusqu’à présent les troubles sont irréversibles. Il est plus aisé chez les patients d’origine portugaise où les antécédents familiaux sont quasi constants, à condition d’avoir un dépistage génétique au préalable et un suivi régulier. Il est plus difficile chez tous les autres patients pour lesquels il n’y a pas d’histoire familiale dans plus de la moitié des cas. Le retard diagnostique peut varier de 3 à 6 ans, car une autre cause de neuropathie que l’amylose est initialement suspectée pour expliquer les troubles ressentis par le patient.
Le diagnostic repose actuellement sur trois éléments :
Lire plusÀ partir de quel moment considère-t-on qu’un patient dépisté porteur de la mutation du gène de la transthyrétine est réellement malade ?
Ce sujet est majeur pour plusieurs raisons.
En effet, les troubles de la maladie sont généralement irréversibles et les traitements anti-amyloïdes sont d’autant plus efficaces qu’administrés à un stade précoce. Or, l’installation de la maladie est insidieuse, difficile à dater très précisément, et on sait que la majorité des porteurs de la mutation du gène de la transthyrétine développeront un jour la maladie.
Pour repérer ce moment, il faut donc l’effort conjugué des patients porteurs de mutation, de médecins spécialistes formés à cette maladie et la réalisation de certains examens complémentaires si besoin pour confirmer la présence d’amylose. D’où l’intérêt d’un suivi annuel chez les porteurs de mutations pour faire un point régulier. Si les conditions sont réunies pour affirmer le début de la maladie, alors un traitement anti-amyloïde est initié par le médecin spécialiste.
On voit encore arriver en consultation spécialisée des personnes de familles touchées.
Elles avaient bénéficié d’un dépistage génétique plusieurs années auparavant et malgré un résultat positif, elles n’ont pas été suivies et arrivent à un stade déjà très avancé de la maladie.
Le traitement d’un patient atteint de neuropathie amyloïde héréditaire nécessite une prise en charge spécialisée par une équipe pluridisciplinaire comportant au minimum un neurologue, un cardiologue, un ophtalmologue et un généticien.
La prise en charge comporte un traitement anti-amyloïde si possible, le traitement des manifestations de la maladie, la prise en charge médicosociale et le conseil génétique pour le dépistage et la prise en charge des porteurs de mutation du gène de la TTR.
Lire plusTraitements anti-amyloïdes
Ils visent à empêcher la formation de nouveaux dépôts d’amylose en stabilisant la Transthyrétine ou en bloquant sa production. Les traitements disponibles à ce jour permettent uniquement de ralentir la progression voire de stopper la maladie mais pas de faire régresser les symptômes déjà installés.
a. La transplantation hépatique ou greffe de foie.
Elle a pour but de supprimer le principal organe producteur de protéine TTR anormale sachant que le foie fonctionne par ailleurs parfaitement bien. C’ est une intervention lourde qui nécessite d’être réalisée dans un centre expert.
Elle a été proposée à plus de 2000 patients dans le monde et a démontré son efficacité à stopper l’évolution de la maladie dans la très grande majorité (70%) des cas traités à un stade précoce. Elle n’est pas conseillée aux sujets dont la maladie a débuté tardivement ou porteurs d’un certain type de mutation et n’est plus réalisable après 70 ans.
Malgré la transplantation, la maladie continue parfois d’évoluer, sur les plans neurologique et cardiaque. Cette aggravation peut s’expliquer par l’accumulation après transplantation hépatique de TTR normale non mutée (dite sauvage) chez les sujets âgés de plus de 50 ans.
b. Médicament « anti-amyloïdes »
Le Tafamidis (Vyndaqel® 20 mg) est un stabilisateur de la transthyrétine mutée permettant de ralentir la progression de la maladie. C’est un comprimé qui se prend tous les jours. Il est bien toléré et il doit être prescrit par un médecin neurologue connaissant la maladie.
c. Médicaments réprimant l’expression du gène de la TTR
Des médicaments ont été mis au point pour contrôler et réduire l’expression du gène de la transthyrétine. Ces molécules sont administrées par injections intraveineuses ou sous-cutanées répétées. Elles vont bloquer la majorité de la production de la transthyrétine mutée et sauvage par les cellules du foie.
Deux importantes études internationales (APOLLO et NEURO-TTR) ont permis de tester l’efficacité de ces médicaments sur la progression de la neuropathie par rapport au placebo. Elles ont permis d’obtenir une mise sur le marché (AMM) européen et français ;
Ces traitements peuvent être prescrits aux stades 1 ou 2 de la maladie (même pour les patients marchant avec aide qui ne disposaient d’aucun traitement jusqu’à 2018).
Le Patisiran (Onpattro®) s’administre en perfusion toutes les 3 semaines à l’hôpital avec une perfusion anti-allergique une heure avant ; il a permis dans l’étude d’améliorer le score de neuropathie et la qualité de vie chez la moitié des patients ; les seuls effets indésirables potentiels sont ceux liés à la perfusion (douleurs abdominales transitoires,…), ou des oedèmes des pieds ; ne justifiant pas de surveillance biologique particulière.
L’inotersen (Tegsedi®) s’administre toutes les semaines en sous cutanée. Les effets indésirables sont le risque de chutes de plaquettes (justifiant des prises de sang toutes les 2 semaines) et la fonction rénale.
Traitement des manifestations de la maladie :
La correction des manifestations de la maladie est très importante pour permettre d’assurer un confort au quotidien et améliorer la qualité de vie des patients.
– Pour les manifestations neurologiques.
Les douleurs nerveuses « neuropathiques » seront traitées avec des médicaments « antalgiques » spécifiques. Récemment, des traitements locaux par patchs à appliquer sur les zones douloureuses ont été élaborés. Des précautions particulières seront nécessaires, pour protéger les pieds et jambes insensibles afin d’éviter les brûlures et les plaies.
Pour les troubles végétatifs, il existe des traitements correcteurs, principalement des régimes et des médicaments.
Pour les troubles moteurs, la rééducation est indispensable.
– Pour les manifestations cardiaques.
L’implantation d’un stimulateur cardiaque (pacemaker) sera peut-être nécessaire pour protéger le patient d’un arrêt cardiaque brutal.
– Pour les manifestations ophtalmologiques.
Quand elle est responsable d’une baisse visuelle, l’atteinte vitréenne peut être traitée par une ablation chirurgicale du vitré (vitrectomie) qui permet d’ôter les dépôts amyloïdes avec une bonne récupération visuelle. On associe le plus souvent une ablation du cristallin. Le glaucome se traite avec des collyres qui permettent de faire baisser la tension oculaire. Quand ces derniers sont inefficaces, on peut avoir recours à des traitements par laser ou à une chirurgie du glaucome (trabéculectomie) pour faire baisser la pression de l’œil. La sécheresse oculaire se traite avec des collyres qui remplacent les larmes (substituts lacrymaux).
L’amylose héréditaire familiale à transthyrétine est une maladie chronique.
Un suivi très régulier de la maladie par une équipe multidisciplinaire associant neurologue, cardiologue et hépatologue en cas de greffe hépatique, voire d’autres spécialistes selon les cas, est indispensable.
Lire plusSans traitement, la maladie évolue inexorablement vers l’aggravation des déficits sensitifs et moteurs, des troubles végétatifs, et souvent une atteinte cardiaque, responsables de handicaps. La mort survient en une dizaine d’années. La transplantation hépatique peut permettre de stopper la maladie surtout si elle est réalisée précocement dans l’évolution des troubles. Elle a permis de doubler la survie des sujets avec mutation Met30 et jeunes (moins de 50 ans) à un stade précoce. Les médicaments « anti-amyloïdes » disponibles permettent de ralentir la progression de la maladie, nous ne disposons pas encore
d’information sur leur impact sur la survie.