Pr Gilles GRATEAU
Pr Gilles GRATEAU
A côté des amyloses de la transthyrétine il y a plusieurs autres formes d’amyloses héréditaires causées par des mutations d’autres protéines
Dans les amyloses héréditaires, la protéine de structure anormale qui s’accumule dans le corps est causée par une mutation génétique. La plus fréquente est liée à des mutations de la protéine transthyrétine qui cause essentiellement une atteinte des nerfs périphériques et du cœur. On l’appelle ATTR où TTR désigne la transthyrétine
Les formes d’amyloses héréditaires causées par des mutations d’autres protéines sont les formes les plus rares des amyloses multisystémiques, c’est-à-dire qui touchent plusieurs organes.
Les protéines en cause dans ces formes sont : la chaîne alpha du fibrinogène, plusieurs protéines de la famille des apolipoprotéines : A1, A2, A4, C2, C3, le lysozyme, la gelsoline
Ces formes sont très rares et n’ont pas de caractéristiques cliniques particulières. Ce qui est particulier, c’est le caractère familial de la maladie, avec présence d’autres cas d’amylose dans la famille, chez les ascendants, dans la fratrie et chez les enfants d’un patient. Cette répartition est liée au mode de transmission génétique de la maladie qui est « dominant ». En présence de plusieurs cas d’amylose dans une famille, il faut penser en premier lieu à l’amylose de la transthyrétine, mais aussi à ces formes plus rares.
Cependant les autres cas d’amylose dans la famille ne sont pas toujours reconnus
Dans certains cas, le patient peut être le seul sujet de la famille atteint
On pense alors à ces formes génétiques rares après exclusion des formes les plus fréquentes.
Les amyloses héréditaires rares touchent en premier lieu les reins
Comme pour les autres maladies qui touchent les reins, il n’y a pas de symptômes pendant longtemps. Le patient ne se plaint donc de rien, alors que l’amylose se dépose progressivement dans les reins. Les symptômes cliniques sont donc tardifs : gonflement des chevilles, élévation de la pression artérielle, et symptômes généraux provoqués par l’insuffisance rénale quand elle est importante (fatigue, pâleur, essoufflement, démangeaison).
Lire plusEn dehors du rein qui est l’organe cible principal tous les autres organes peuvent être potentiellement touchés, cela dépend surtout de la nature de la protéine qui est mutée.
Comme pour toutes les formes d’amyloses, le diagnostic nécessite un prélèvement tissulaire, ou biopsie, qui porte soit sur un tissu facilement accessible comme les glandes salivaires accessoires, soit sur le tube digestif. En effet, les dépôts y sont fréquents alors qu’il n’y a pas de symptômes.
Cependant, il arrive souvent que le diagnostic d’amylose ne soit pas suspecté, car nous sommes ici dans le cas des formes les plus rares d’une maladie rare. Dans ce cas c’est le plus souvent une biopsie rénale qui est faite, seul moyen de vraiment savoir ce qui est présent dans le rein.
Il faut ensuite affirmer la présence d’amylose avec la technique du rouge Congo. Un examen plus approfondi de ces dépôts avec des anticorps spécifiques (réservé à quelques laboratoires spécialisés) peut aider au diagnostic, lorsqu’il montre que les dépôts ne sont pas reconnus par les anticorps qui réagissent avec les protéines les plus fréquemment trouvées et qu’ils réagissent avec les protéines en cause dans ces formes rares.
Le diagnostic de ces formes génétiques rares repose surtout sur un test génétique qui recherche les mutations dans les gènes qui codent les protéines qui peuvent être en cause.
Une enquête familiale doit être effectuée pour dépister des cas asymptomatiques et permettre le conseil génétique quand un sujet atteint veut avoir des enfants.
D’après la loi française, le dépistage doit être fait au cours d’une consultation génétique, avec un entretien préalable avec un psychologue. Il s’adresse uniquement aux sujets adultes (majeurs âgés de plus de 18 ans). En premier lieu, ce dépistage s’adressera aux membres de la fratrie (frères et sœurs du patient) et aux enfants majeurs du patient.
Lire plusEn cas de négativité du test génétique, le patient n’a aucun risque de développer un jour la maladie, ni de la transmettre à ses enfants et à sa descendance. En cas de positivité, il est à risque de développer la maladie et de la transmettre à ses enfants. Un bilan à la recherche de signes débutants de la maladie (atteinte rénale) sera recommandé dans cette situation.
Le traitement comporte deux parties.
Tout d’abord le traitement de l’atteinte rénale. Lorsque les reins ne fonctionnent plus, les patients peuvent être traités par la dialyse. Le plus souvent la transplantation rénale est possible, mais la maladie peut revenir sur le rein greffé.
Mais le vrai traitement serait de supprimer la production de la protéine mutée qui cause la maladie.
Cela peut être envisagé quand la protéine est produite par le foie, comme pour la transthyrétine. On peut alors proposer la greffe de foie. Ainsi ce traitement peut être envisagé en cas d’amylose par mutation de la chaîne alpha du fibrinogène. Par contre, il ne peut pas être mis en œuvre dans les formes liées à des mutations du lysozyme, car cette protéine est produite par de nombreux tissus.
Il est très important de faire un diagnostic précis de la forme d’amylose génétique rare, car le traitement est très différent d’une forme à l’autre, alors que les symptômes peuvent être identiques.
L’évolution de ces maladies est très variable notamment pour l’atteinte des reins dont la fonction peut se dégrader lentement ou au contraire rapidement. Cela nécessite dans tous les cas un suivi de la maladie rénale.